
L’hiver 1709, appelé « Grand Hyver », fut un épisode de froid en Europe qui marqua durablement les esprits car il provoqua une crise de subsistance qui entraîna une famine. En France, cet hiver fut particulièrement cruel : à Paris les températures furent très basses et en janvier 1709 elles s’effondrent pour atteindre -20°.
Toutes les régions sont touchées avec la destruction quasi complète des oliveraies, de très gros dégâts dans les vergers et la destruction des blés.
Les registres paroissiaux des baptêmes mariages et décès tenus par les curés sont à cet égard une source incomparable pour apprécier l’étendue du désastre et les curés de Touraine ne manquent pas de signaler ses excès.
La vague de froid débute le jour des rois, le 6 janvier 1709.
Mouzay : privés de manger des noix


L’hiver de l’année mil sept cent neuf fut si violent que
tous les gros bleds gelerent ce qui causa une grande misere le
bled n’ayant quasi point de prix et si on n’eut point semé des orges
deans les guérés ou les gros bleds avaient gelé tout le monde
serait mort de faim les vignes et les autres arbres fruitiers
gelerent d’une telle maniere qu’on ne cueillit cette année
la point de noix du tout et tres peu de fruit les noyers furent
entièrement gelés et perdus d’une telle manière que les hommes
de ce lieu ont été privé de manger des noix
toute leur vie Dieu nous préserve de l’avenir d’un si
funeste accident.
Jaille curé de Mouzay
Le froment a vallu quarente cinq francs la pochée
l’orge quarente, cinquante et un écu le boisseau.
Le Grand-Pressigny (St-Gervais) : une des années les plus malheureuses


L’année 1709 a esté une des plus malheureuses qui ait jamais
este son malheur commenca la vigile des Roys par une gellee qui dura
jusques au vingt cinq de janvier elle gatta toutes les legumes fit
jetter les fonds a beaucoup de tonneaux gela universellement les
noyers presque tous les poiriers les trois quarts des pommiers
beaucoup de chesnes la moytié des vignes tous les oliviers et tous
les froments détruisit presque touts les perdrix rouges tua
une infinité d’oyzeaux a presque fait mourir tous les autres
arbres et ce qui estait resté de bled froment fut gasté a la
fleur par un brouillard universel avec les vignes de sorte qu’il ne
s’est pas fait en ce pays icy une seule goutte de vin…
Sainte-Radegonde : il faudra qu’une partie du monde périsse

L’ année 1709 le 6 janvier commenca une gelée si violente
qu’on dit qu’on n’en avait jamais vu de pareille les arbres
et les rochers s’en fendirent la plupart des arbres
fruitiers entrautres les noyers les chataigners et
les vignes pour la plupart en sont morte, elle ne dura
par bonheur que dix sept jours et elle fut succédée d’un
temps doux et même chaud mais huit ou dix jours
après il vint une autre gelée qui ayant trouvé la terre
détrampée et les blés tendres désola entièreement les
moissons, de sorte qu’il n’est resté aucun blé sur la terre
et le bled qui fut recueilli put a peine suffire pour ensemencer
les terres le bled vieil est monté a un prix ecessif et sans
les bons ordres que la cour les parlements et les officiers
y aporterent il n’aurait point eu de prix…
Genillé : tout le vin gela dans les caves

Le sixième jour de janvier de cette
année 1709 commenca sur les deux
heures après midi le froid le plus grand
dont on ait jamais ouï parler. Il dura
dix huit jours tous plus froids les uns que
les autres ; quoique dès le second jour tout le
vin gela dans les caves les tonneaux s’étant
entrouverts il y en eut quantité de perdu
le plus subtil se concentra dans le milieu
du poinçon où il fallait le percer pour en
pouvoir tirer apres le dégel le reste n’etait
que comme du demi vin.
Il tomba de la neige le troisième jour
mais comme elle n’etait que comme de la cendre
et qu’il ne se fit point par dessus une espèce de
croute comme à l’ordinaire le vent la poussa
aisément et elle ne put mettre les bleds a couvert
de la gelée de sorte qu’ils gelerent tous sans exception


[…] L’orge à l’eau que l’on regardait comme
la nourriture des pourceaux devint celle
de presque tout le monde et celui la etait
heureux qui avait de l’orge.

[…]Les gros arbres ne furent pas assez forts pour
se deffendre de la gelée. on voyait de tout
des chesnes et des ourmeaux que le froid
fait fendre jusque dans les racines.

[…] Il y eut quantité d’animaux qui périrent
par la violence du froid. des vaches des
cochons en moururent j’ay vu un cheval au
moulin du pont, duquel les oreilles tombèrent
par la gelée…
La situation des paysans est désespérée : le froid a anéanti toutes les récoltes. Les prix du pain grimpent, une atroce famine gagne les provinces du royaume, la maladie s’attaque aux organismes affaiblis, des épidémies emportent des milliers de personnes.
Epuisé par les guerres interminables et les crises agricoles précédentes le royaume éprouve toutes les peines du monde à surmonter la terrible épreuve.
Le long règne de Louis XIV commencé sous les meilleurs auspices s’achève dans les souffrances et le désespoir d’un royaume fatigué.
Sources :
– wikipédia
– Archives départementales d’Indre-et-loire
– Historia
– B. Briais (drames du passé en Touraine)
belle recherche merci. J’ai bien lu tout le mal que ce fléau a engendré et je suis surprise que l’on évoque (en 1708) les oliviers ? Je ne pensais pas que cet arbre fruitier existait dans la région. On apprend tous les jours. C’est super. HV
Lors de la saisie des actes de la commune d’Azay sur Cher, effectuée en 2018, pour alimenter les bases du CGDT (5000 actes), j’ai réalisé des statistiques sur les naissances, mariages et décès entre 1700 et 1749, et constaté : décès : moyenne sur les 50 ans = 54 ; décès 1707=74 ; décès 1708=62 ; décès 1709=63 ; décès 1710=77, mariage : moyenne sur les 50 ans = 19 : mariage 1709=7 ; mariage 1710=10, naissance : moyenne sur les 50 ans = 59 ; naissance 1709=73 ; naissance 1710=29. le solde naissance/décès est le plus important sur les… Lire la suite »