deux générations de « champions » dans l’histoire du cyclisme !

Article de Patricia PILLORGER,
présidente du
Centre Généalogique de Touraine
Léon, né le 2 octobre 1879 à Preuilly-sur-Claise, est l’aîné des garçons de Joseph GEORGET et Louise BARNIER, un des cafetiers de ce village du sud de la Touraine. Il se marie le 23 avril 1914 avec Émilie POISNET à Levalllois-Perret (92) et décède le 5 novembre 1949 en son domicile à Neuilly-sur-Seine. Léon se fait connaître lors des épreuves préliminaires du « Paris-Bordeaux » en 1902, il est surnommé « Monsieur Bol d’Or » ou « Le Brutal » en raison du vin rouge qu’il buvait pour se soigner.
Léon, professionnel de 1902 à 1924, est le vainqueur à 9 reprises du « Bol d’Or » battant le record en 1908. Il participe dès 1903 au « Tour de France » puis de 1906 à 1908. Avec son frère Émile, ils participent aux « Six Jours de Toulouse », « Six Jours de New-York » et « 24 heures de Bruxelles ».


Émile, né le 21 novembre 1881 à Bossay-sur-Claise, frère de Léon, se marie le 30 avril 1918 à Châtellerault (86) avec Suzanne PETIT et s’éteint le 16 avril 1960 âgé de 78 ans. Émile a toujours vécu à Châtellerault : il y a travaillé comme mécanicien avant de s’y installer en tant que garagiste en 1919 ; il fut également conseiller municipal. C’est à Usseau qu’Émile fit son apprentissage de forgeron chez le Père SIBERT. C’est donc avec ce dernier, habile ouvrier, qu’Émile a fabriqué ses deux premières roues de vélo, des roues en bois qui sont restées longtemps dans un grenier. Il montait la côte de la « motte » et se laissait couler en bas. Un jour il a voulu faire un exploit à la sortie de la messe : il est allé en haut, a raté le virage, et a atterri dans l’abreuvoir municipal (source : mille et une anecdotes du pays châtelleraudais de Albert FROGER).
Émile, professionnel de 1903 à 1914, participe de 1905 à 1914 au « Tour de France » où il termine 3ème du classement général en 1907 et 1911. Il gagne plusieurs courses sur route dont le « Paris-Bordeaux », « Paris-Brest », « Paris-Hesdin », « Paris-La Flèche », « Paris-Tours ».
Pierre, né le 9 août 1917 à Châtellerault, est le second fils de Léon et Émilie. Il se marie le 26 juin 1948 à Neuilly-sur-Seine avec Georgette MOURMANNE et décède âgé de 46 ans, le 1er août 1964 à Paris. Dès son plus jeune âge, Pierre, installé à Neuilly avec ses parents, s’entraîne.
En 1933, il adhère au Vélo club de la Marine. Lorsqu’il ne s’entraîne pas sur piste plusieurs fois par semaine, Pierre circule quotidiennement à vélo pour assurer la distribution des journaux de la messagerie Hachette dans les rues de Paris.
Pierre est un cycliste amateur, il participe aux Championnats du Monde et aux Jeux Olympiques de 1936 en qualité de sprinter. Au Parc des Princes, en août 1941, il bat le record du monde des « trois-quarts de mille » en 1 minute 27 secondes 3/5.

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Leur devise : Travailler pour vivre, Travailler pour devenir un champion.
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Descendance de Joseph et Louise
Revue de presse du Palmarès des Frères GEORGET
1906 : Le caissier prend la fuite avec la recette
Le vélodrome du Bazacle à Toulouse (31) organise la course des six jours européens par équipe de 2 coureurs, copiant ainsi la célèbre épreuve du Madison Square Garden, les six jours de New-York.
1906 sera l’unique édition de cette course, un incident sans précédent vient perturber cette grande première.
Vers la 51ème heure, alors que les concurrents roulent sans trêve depuis 2 jours et 2 nuits, le bruit se répand que l’organisateur de ces 6 jours a disparu, emportant la maigre recette réalisée jusque-là.
Une fois le forfait avéré, il est annoncé aux concurrents la disparition du caissier et surtout celle de la caisse, et ils décident de s’arrêter aussitôt.
Après une première réaction de dépit, les coureurs soutenus par la municipalité décideront de poursuivre l’épreuve et de se redistribuer les recettes des prochains jours.
Motivées, les équipes vont se livrer une superbe bataille remportée par les frères Émile et Léon GEORGET, qui couvriront les 3 212,448 km en 123 heures.
1907 : Émile perd le Tour de France pour irrégularité
À une semaine de l’arrivée finale à Paris (75), plus personne ne doute de la victoire d’Émile GEORGET, tant sa supériorité et son avance sont considérables.
Dans la 9ème étape du Tour entre Toulouse et Bayonne, disputée sous une chaleur écrasante, une crevaison au contrôle d’Auch retarde Émile, alors que PETIT-BRETON s’en va tout seul pour un dernier baroud d’honneur.
Émile emprunte la bicyclette poinçonnée (dont les pièces essentielles ne peuvent être changées) du Parisien PRIVAT, commettant une première infraction ; puis il abandonne ce vélo compromettant au Brestois LAURENT, un « Alcyon » aidant un « Peugeot » : deuxième faute. Émile terminera à la 4ème place, plus d’une demi-heure derrière PETIT-BRETON.
Mais la faute d’Émile ne passe pas inaperçue auprès de ses adversaires, qui déposent aussitôt une réclamation. Après de nombreuses discussions, la direction du Tour décide de le rejeter à la dernière place de l’étape, le reléguant ainsi à la 3ème place du classement général.

au Criterium français

Léon

Vainqueur du Bol d’Or
pour la 7ème fois

Émile
sur piste
et au Tour de France

Tour de France 1907 – BnF Gallica : Revue illustrée Armes et Sport du 18 juillet 1907
1910 : Émile chute… et Léon a du Bol
Léon GEORGET remporte pour la 5ème fois le Bol d’Or (épreuve d’endurance de 24 heures courue dans le sillage d’un entraîneur sur motocyclette sur les pistes parisiennes du Buffalo ou du Vel’d’Hiv dont le trophée est une coupe en bronze dorée ressemblant à un bol offert par les Chocolats Meunier).
C’est son frère Émile qui fait figure de favori, mais il fait une chute à la 7ème heure : ses blessures le handicapent tellement qu’il doit quitter la course 4 heures plus tard.
Léon en profite pour prendre la tête . Le vainqueur n’a pas cherché à battre le record de l’épreuve, mais plutôt à s’économiser pour les dernières heures de course.
1911 : Émile, le pionnier qui terrasse le Galibier
5ème étape du Tour de France entre Chamonix (74) et Grenoble (38) : les coureurs doivent franchir pour la première fois le terrible Galibier.
Le 10 juillet, Émile GEORGET est le premier dans l’Histoire de l’Humanité à escalader à vélo les 33 km de côte sans mettre pied à terre. L’effort est hallucinant, effarant, dantesque.
Lancé dans l’ascension avec son compère Paul DUBOC, qui finira par lâcher prise, Émile à 30 ans signe la première grande page de la légende des grimpeurs.
Il est décrit par un chroniqueur sportif de l’époque de façon fort pittoresque : sale, moustache pleine des nourritures du dernier contrôle, le maillot sali des pourritures du dernier ruisseau où il s’est vautré, il jette un affreux mais auguste : « Ça vous en bouche un coin ! »
1919 : le dernier Bol de Léon
Les premières heures de la course sont monotones, malgré le train assez rapide. A la 16ème heure, seuls 2 abandons.
Lorsque la fatigue des coureurs commence à se faire sentir, Léon GEORGET, comme à son habitude, accélère légèrement et aussitôt ses adversaires décrochent irrémédiablement.
« Mes rivaux se sont dépensés à fond quand c’était le moment de se ménager. Il ne faut pas se laisser influencer par les encouragements du public, qui ne comprend que la vitesse et la lutte » rappelle sagement le vainqueur.
1936 : la France remporte le titre olympique en course poursuite de cyclisme :
Lors de la 7ème journée, depuis que le cyclisme fait partie du programme des jeux olympiques, c’est la 1ère fois que la France gagne le tournoi de la poursuite. La quadruplette a magnifiquement gagné, elle parcourt les 4 kilomètres en 4 minutes 45 secondes. Le tournoi olympique se termine par l’épreuve du kilomètre avec départ arrêté où Pierre GEORGET se classe second, il se montre sous un excellent jour avec un temps de 1 minute 12 secondes et 4/5. Cependant il n’est que 3ème dans le 2000 mètres en tandem avec MATTON. En effet, le tandem a subi une cruelle défaite : bien qu’elle fût l’équipe la plus rapide de tous les concurrents, elle s’est laissée devancer par les Allemands qui, soutenus par les voix de la foule, ont fait une course au-dessus de leurs moyens physiques.
Le patronyme GEORGET dérive du nom de baptême Georges largement popularisé dès le VIème siècle en Gaule, par plusieurs saints de ce nom (source : histoire d’un nom de Marie-Odile MERGNAC)
Les ancêtres de Léon, Émile et Pierre sont plusieurs générations de cultivateurs, laboureurs. Sous l’Ancien Régime, le laboureur est le paysan qui possède de la terre et qui la cultive avec un cheval et une charrue. Sur plus de dix générations, ils ont vécu dans le sud de la Touraine, entre Le Grand-Pressigny et Bossay-sur-Claise;
Généalogie patronymique des GEORGET
Sources
– État civil, AD37, AD86, AD92
– « Un siècle de cyclisme » aux éditions Larousse
– Bnf Gallica et Wikipedia
-Centre Généalogique de Touraine, Bulletin Touraine Généalogie n° 72, 4ème trimestre 2007
Toujours passionnant…je me régale ! Merci