
Article rédigé par l’Atelier du Centre Généalogique de Touraine
Le comte Joseph François René Marie Pierre de KERGARIOU, député de 1802 à 1827 et nommé pair de France par Charles X le 5 novembre 1827, est né à Lannion (Côtes-du-Nord) le 25 février 1779 ; il était fils d’un magistrat distingué du Parlement de Bretagne. Il est mort à Portrieux (Côtes-du-Nord) le 15 juin 1849.
Fils de messire René Fiacre de KERGARIOU, chevalier et seigneur comte du dit nom, conseiller au parlement de Bretagne, et de dame Marie Vincent Ange Le CORGNE de LAUNAY, il se destina d’abord à l’École polytechnique, puis se consacra aux études historiques et archéologiques.

Ce fut le canton de Paimpol, du département des Côtes-du-Nord, qui ouvrit le monde politique à M. de KERGARIOU en l’élisant, au mois d’octobre de l’année 1808, membre du collège électoral. M. de KERGARIOU s’était préparé par de fortes études à la vie publique et sa jeunesse s’était émue des luttes entre le pouvoir ministériel et les parlements.
Membre correspondant de l’académie celtique le 9 avril 1805, il fait partie en 1808 de la députation envoyée au chef de l’État par le collège électoral des Côtes-du-Nord. Nommé Chambellan, il demande à suivre l’Empereur dans la campagne de Wagram : demande refusée.
Rentré dans sa famille, il reprend sa vie d’études : l’économie politique et l’économie commerciale sont, avec l’histoire, les sujets successifs de ses sérieux et nombreux travaux.
M. de KERGARIOU est nommé chevalier de la Légion d’honneur le 30 juin 1811 et, le 14 juillet suivant, sous-préfet du Havre. Il sera élevé à la dignité de Pair de France le 5 novembre 1826.
Il devient préfet d’Indre-et-Loire par décret du 26 décembre 1811, en remplacement du baron Lambert, et signale son début dans le département d’Indre-et-Loire par des actes administratifs empreints d’un esprit d’équité, d’initiative éclairée et féconde, de noble et convenable indépendance.
Les établissements, les oeuvres de bienfaisance, la restauration, l’agrandissement, l’assainissement des hôpitaux et des casernes, le sort du pauvre et le sort du soldat deviennent l’objet de ses travaux assidus et de son active sollicitude. Le 6 août 1814 il reçoit solennellement, à Tours, le duc d’Angoulême et lui adresse, à la tête des autorités de la ville, un chaleureux discours dans lequel il se félicite du retour des Bourbons. Le 14 septembre il prête serment de fidélité au roi, à la mairie de Tours. Il sera noté, dans cette dernière résidence, comme un excellent administrateur.
Il est appelé, le 13 du mois suivant, à la préfecture de Strasbourg.
A son départ, il adresse aux fonctionnaires du département d’Indre-et-Loire une lettre d’adieux où l’on peut lire :
« Les temps de mon administration ont été difficiles. Je suis bien loin d’avoir pu faire tout le bien que j’aurais désiré ; mon successeur sera plus heureux. Cependant j’ai obtenu quelques résultats importants. La construction des écuries du château, l’assainissement du ruau Sainte-Anne, dont la plantation doit avoir lieu incessamment, la libération de la dette de l’hospice de Tours, etc., telles sont les entreprises exécutées. De grandes communications vicinales doivent être poursuivies. Tout est préparé pour faire des plantations de la levée du Cher, depuis Sainte-Anne jusqu’à Montlouis, travail qui sera aussi agréable pour les environs de Tours qu’avantageux pour les communes et les propriétaires riverains. J’aurais voulu faire plus encore : le Roi en a ordonné autrement et m’appelle à la préfecture de Strasbourg. »
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Le Ruau Sainte-Anne
Sainte-Anne, commune de La Riche-extra où se trouvaient un prieuré appartenant au prieuré de Saint-Côme, ainsi qu’un ruau (rualium Sanctae-Annae XIIe siècle) qui établissait une communication entre le Cher et la Loire. La tradition attribue à Louis XI la création du Ruau Sainte-Anne, mais ce canal paraît avoir été antérieur au règne de ce monarque qui, le 22 juillet 1473, se plaignit de l’ensablement du canal qui nuisait à la navigation et à la salubrité publique : il fut résolu qu’on le ferait déblayer. En 1774, il était ensablé de nouveau et l’intendant, M. de Cluzel, ordonna de remplacer le pont Sainte-Anne en ruine par un remblai qui intercepta définitivement le canal que la ville de Tours céda, en 1813, à l’Hospice général.
Extrait de la Carte particulière de Tours avec le paysage mis en relief de R. Siette
15 juillet 1619 (source gallica.bnf.fr)
Un arrêté de M. le préfet en date du 16 novembre 1841, en appelant M. Margueron à faire partie du conseil d’administration de l’Hospice général de Tours, allait ouvrir une nouvelle et dernière carrière à ses nobles sentiments. Les abords de cet asile de la souffrance étaient rendus infects par le lit envasé du canal, appelé Ruau Sainte-Anne, par lequel la Loire et le Cher avaient jadis mêlé leurs eaux entre les murs de Tours et ceux du Plessis. Les ondes limpides des deux rivières avaient depuis longtemps cessé de s’y rencontrer, et elles étaient remplacées par le dégorgement fétide des égouts de la ville. Une impure alluvion, formée d’immondices, remplissait le fond du canal abandonné et semblait poser la fièvre et la mort en face du lieu que, par un étrange contraste, les hommes affectaient au rétablissement de la santé et au prolongement de la vie. Lorsque, à son passage à Tours en 1806, l’Empereur Napoléon visita l’hospice, il fut frappé de l’inconvénient du marais putride qui s’étendait devant l’établissement. Pour y remédier, l’État fit don du Ruau Sainte-Anne, faisant partie du domaine public, à la ville de Tours, à la condition qu’elle l’assainirait. La ville se contenta d’y planter des peupliers d’Italie, qui ajoutèrent au bourbier par les détritus végétaux et par l’omble qu’ils apportèrent. Ces peupliers avaient atteint un grand développement lorsqu’ils furent renversés par un violent ouragan le 29 mars 1836.
M. Margueron, dès qu’il fut membre de la commission administrative, songea à faire exécuter d’une manière sérieuse la pensée impériale : dès 1838 il travailla à faire assécher le marais et aujourd’hui il n’en reste aucune trace.
Il rattacha à ces travaux la pensée de créer un jardin destiné à faciliter aux élèves de l’École préparatoire l’étude de la botanique et pouvant offrir aux habitants de la ville une promenade vaste, ornée des phénomènes les plus intéressants de la nature végétale : des chevaux, des chariots furent achetés pour aider au transport des terres. Il est certains points de l’ancien canal qui reçurent jusqu’à trois mètres de remblai. On avait obtenu un premier niveau auquel on croyait pouvoir s’arrêter lorsqu’une crue, arrivée en avril 1843, produisit des infiltrations qui submergèrent le terrain. Il fallut se remettre à l’oeuvre, et un nouveau remblai de près d’un mètre ramena définitivement le sol du jardin à la hauteur des terres voisines.
Mais les levées que l’on avait démolies, pour en ramener la terre au point d’où elle avait jadis été extraite, offraient une matière sablonneuse et ingrate qu’il fallut recouvrir d’une couche plus productive ; on alla chercher au loin et à grands frais cette terre chargée d’humus. Le terrain ainsi préparé, M. Margueron s’occupa de l’enclore et de murer le jardin. Une rivière légèrement sinueuse et des bassins de dimensions diverses reçurent le trop-plein des eaux du puits artésien de l’hospice et répandirent pendant deux ou trois ans la sève et la fraîcheur sur tous les points. Mais le puits foré ayant cessé tout à coup de donner ses eaux, le jardin se trouva en souffrance jusqu’à ce que les eaux du Cher, amenées dans la ville et à l’hospice, pussent en partie réparer la perte qui avait été faite. Des appels furent adressés à tous les directeurs de jardins des plantes en France, à Alger et aux colonies et en moins de deux années, le jardin présenta une collection étendue de végétaux.
M. Margueron cessa ses fonctions d’administrateur de l’hospice en juillet 1852, en même temps que celles de directeur du jardin botanique.
Nouveau plan de Tours 1893
(source gallica.bnf.fr)
Sources :
Gallica BnF :
Éloge de M. le Comte de Kergariou, prononcé dans la séance publique du congrès de l’Association bretonne à Morlaix le 10 octobre 1850 par M. Ath. SAULLAY de L’AISTRE, président de la Société archéologique et historique des Côtes-du-Nord
Extrait des Annales de la Société d’agriculture, sciences, arts et belles-lettres d’Indre-et-Loire (BnF Gallica)
Plans de Tours
J.X. Carré de Busserolles
Très intéressant. Il devait être bien apprécié car il a pu subsisté malgré les changements de régime.
Le comte de Kergarou est décédé à Bringolo (Côtes-d’Armor) Bringolo 1832 – 1850, acte 15, vue 272
Dommage que cette information, avec l’histoire du ruau au temps des mariniers, ne figure pas sous forme de panneau à l’entrée du jardin botanique. Je connaissais, en partie, cette histoire, mais, dans mes relations, je me suis aperçu que peu de personnes de Tours la connaisse.