La UNE rouge

Article de Catherine BAS-DUSSEAUX avec la collaboration de Marie-Louise GILLET, Odile MENARD et Roger RENAULT – Paru dans le Touraine Généalogie n° 8 – 4ème trimestre 1991 page 267 Rubrique « La Gazette des Paroissiaux »

Plus discrète que de nos jours, la mort violente n’en a pas moins été toujours présente dans notre environnement.

Comme d’habitude, souvent le seul capable de tenter de comprendre et de démêler ces affaires, le curé, relate dans ses registres paroissiaux les évènements dramatiques qui bouleversent de temps en temps la vie de sa petite communauté.

Le plus souvent, c’est l’eau de nos rivières qui se montre la plus grosse mangeuse d’hommes.

Carte interactive de quelques événements dramatiques dans des villages de Touraine :
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Ainsi, à La Chapelle-sur-Loire, le 26 juin 1782, un cadavre masculin, trouvé noyé dans la rivière, est celui d’Alexis GUERRY, 14 ans, fils de Jean GUERRY et Marie BEAUFUMÉ, voiturier par eau de Châtellerault, paroisse Saint-Jean-l’Évangéliste.

On trouve le 27 octobre 1782, à Bourgueil, l’acte de décès de Jacques LE MOINE, natif de Saint-Sulpice d’Orléans, résidant ordinairement à Nantes, « noyé d’hier, âgé de 60 ans ».

A Azay-sur-Indre, on peut lire :

Registre BMS 1792 Azay-sur-Indre 6NUM6/016/087 vue 4

« L’onze aoust mil sept cent quatre vingt douze a été inhumé
dans le cimetiere de cette paroisse apré le delais suffisant par
moy curé soussigné et en consequence de la levée et visite qui
a eté faite par la municipalité de notre paroisse, françois
de la paroisse de chambourg trouvé noyé sur notre paroisse,
fils de deffunt vincent champignÿ vivant journallier et de
jeanne pasquier sa legitime Epouse, agé d’environ six ans,
etant de la hauteur d’environ trois pieds, poil noire en presence
de françois allegret officier municipal, Martin Berthault
procureur de la comune et jaque Léveques qui ont signés avec
nous. »
Signé F.G. Riche, curé

Et le 18 avril 1851, à Vouvray, on trouve l’acte de décès de Pierre GRANGER, marinier, âgé d’environ 44 ans, époux de Sylvine NAU, décédé par suite d’une immersion « le six février dernier au lieu de la Frillière » commune de Vernou et qui « a été retrouvé par le dit sieur DUVAL, hier jeudi dix-sept avril, présens mois, dans le lit de la Loire au lieu de l’Ile Séguin ».

Registre décès 1833-1866 Vouvray 6NUM8/281/010 vue 224

Mais l’accident ou le crime frappaient aussi nos aïeux.

C’est pourquoi à Saint-Patrice, le 14 février 1726, « a été inhumé dans le cimetière le corps d’un homme trouvé mort et assassiné proche la maison appelée la mère Barbe, le 12 de ce mois, âgé d’environ 30 ans ainsi qu’il est plus au long rapporté dans le procès-verbal fait par la maréchaussée de Langeais ».

Registre BMS 1727 Orbigny 6NUM6/177/019 vue 4

Et qu’à Orbigny, le 29 janvier 1727, a été inhumé dans l’église âgé de 19 ans « pierre couture fils de Silvain Couture Tessier et de feue Magdelaine SIMONNEAU, trouvé mort le 22 de ce mois à la porte de Pierre CUISINIER de…, son maître et allié qu’il était au service, par un accident d’un fusil qu’il prit dans la maison et qui en voulant le décharger se laissa aller et le tua ».
La justice est avertie et veut faire transférer le corps à Montrésor. Le curé s’y oppose car le « chirurgien juré attestast qu’il n’y avait point de délit ». 24 heures après le curé apprend que le transfert va avoir lieu et va « processionnellement arrêter le cadavre sans résistance ni violence de part et d’autre ». Il l’amène alors à l’église et l’y laisse « sans l’enterrer six jours entiers. On fist pendant ce temps des informations contre moi qui ont été à néant », et enfin, après une nouvelle expertise, il peut procéder à l’inhumation. Mais qui allait « le dépouiller, l’ensevelir et le porter au cimetière » ? Les habitants assemblés décident en voyant le cadavre qu’il fallait l’enterrer avec ses habits et dans l’église. Ce qui fut fait « avec les cérémonies ordinaires ».

Tandis qu’à Saint-Symphorien, près de Tours, une très longue déclaration du 17 décembre 1811 concerne la découverte faite par « le nommé DREUX fils… allant à ses travaux, dans un fossé sur la grande route de Beaumont-la-Ronce et environ à cinq pas de la petite arche, dite du Noyer » d’une « femme qui y était tombée et presque couverte d’eau ». Suivent les procédures d’usage, et le chirurgien expert conclut à la noyade, tandis que personne ne reconnaît la victime. Vient alors un très minutieux inventaire des « effets qu’elle avait sur elle » : un mauvais petit bonnet de mousseline simple, un mouchoir de cou à barres rouges, une camisole de toile de coton blanc, deux jupons de flanelle l’un rayé gris et blanc, l’autre rayé blanc et brun, une paire de poches attachées à ses côtés, contenant entre autres « une clé, une tabatière de cuir bouilli, deux dés à coudre de cuivre et quatre sous de petite monnaie et dans son doigt annulaire de la main gauche un anneau jaune ».
Près d’elle se trouve « un petit panier rond avec son couvercle dans lequel il y avait des pommes et un œuf ». Une mention marginale complète cette description : taille d’environ 4 pieds 8 pouces, visage rond, nez un peu gros et écrasé, yeux petits, front grand, cheveux et sourcils noirs, âgée d’environ 45 ans.
On apprendra bientôt qu’il s’agit de Marie BOUDONNEAU, fille, âgée d’environ 57 ans, demeurant à Tours et qui s’est noyée par accident en revenant de rendre visite à son frère Maurice, jardinier à Notre-Dame d’Oë, chez qui bien sûr elle était allée à pied !
Les déplacements du chirurgien, du commissaire et du porteur ont coûté 13 francs cinquante.

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fergeau
fergeau
4 années plus tôt

Ce sont toujours des évènements prenants
Je me souviens avoir vu dans les registres de Cléré les Pins 2 hommes morts de froid en allant à leur travail à Champchevrier, et des noyés retrouvés à Cinq Mars la Pile où là on a plus de renseignements car le maire était le chirurgien.