Les DAUSSONNE, armuriers à Tours au XVIème siècle

Article de Idelette ARDOUIN-WEISS – Paru dans le Touraine Généalogie n° 110 – 2ème trimestre 2017 pages 97 et 98 Rubrique « Histoire et Généalogie »

Tours a été, avec Bordeaux, un centre important d’armurerie au XVIème siècle, et a attiré un assez grand nombre d’armuriers italiens, venus en particulier de Lombardie (région de Milan)1. On peut citer entre autres les MERVEILLES, les de LAQUES et les DAUSSONNE.
Leurs noms français sont en fait des traductions de leurs noms italiens ou font référence à leur origine. Ainsi, les MERVEILLES s’appelaient en réalité MERAVIGLIA, les de LAQUES sont originaires de Lacco près de Milan, et les DAUSSONNE, d’Osogna en Lombardie.

Les DAUSSONNE représentent la plus importante de ces dynasties d’armuriers, dont il y eut sans doute plusieurs branches dès l’origine. Leur patronyme a évolué pour finalement se transformer en un nom français : on trouve en effet des Venduistre dits Daussonne, des Daussonne, des Norieux dits Daussonne, et finalement des Norieux tout court.
On peut suivre leur trace dans les minutes des notaires de Tours2 et dans les registres paroissiaux.

VENDUISTRE

Etienne VENDUISTRE, armurier à Tours, est cité au début du XVIème siècle, de 1516 à 1525 :

  • 17.12.1516 (3E1/24), avec sa femme Perrine ROUSSEAU, il achète une vigne.
  • 01.06.1522 (3E1/8), ce couple achète une autre vigne. Etienne est qualifié d’honorable homme.
  • 29.08.et 02.05.1525 (3E1/28), il intervient dans deux actes.

Mais entre temps, il a changé de patronyme : le 30.12.1521, Etienne VENDUISTRE dit DAUSSONNE, armurier à Tours, reçoit un harnais de guerre complet de messire François de BEAUNE (3E1/27).
Il semble donc que VENDUISTRE soit son patronyme d’origine et qu’il était originaire d’Osogna.

DAUSSONNE

Des armuriers de ce nom apparaissent à Tours bien avant Etienne VENDUISTRE, dès 1501.
Jehan DAUSSONNE, armurier, est témoin les 15.09.1501 (3E1/17) et 29.08.1506 (3E1/21).
Citons aussi un Martin DAUSSONNE, qui entre en apprentissage chez le serrurier Jehan ROUSSEAU le 29.08.1506 (3E1/21).
On en trouve ensuite à Tours à la fin du siècle : Jehan DAUSSONNE, armurier du roi en son château de Nantes et maître armurier à Paris, demeurant de présent à Tours, fils de feu Jehan, maître armurier à Paris, vend une rente le 16.11.1592 (3E5/254).
Des DAUSSONNE, sans rapport apparent avec les armuriers, font leur apparition au milieu du siècle : Claude DAUSSONNE, fille de feu Pierre DAUSSONNE et de Marie ROY, est l’épouse de Jehan VERON, marchand boucher à Rochecorbon (01.10.1586, 3E5/241).

NORIEUX (NORIEULX)

Les NORIEUX dits DAUSSONNE deviennent nombreux dès le premier tiers du siècle. Jehan « NOZIEU » dit DAUSSONNE, armurier à Tours, est sans doute le premier à porter ce double nom en 1530 (04.09.1530, 3E1/30).
Par la suite, tous ces patronymes se mélangent, sauf VENDUISTRE qui se perd. Un même personnage peut s’appeler suivant la date DAUSSONNE, NORIEUX ou NORIEUX dit DAUSSONNE.


QUELQUES GÉNÉALOGIES DU XVIème siècle

Il est difficile d’établir des filiations suivies avant la fin du XVIème siècle, en raison du manque de sources.
Pour simplifier l’écriture, j’adopte l’abréviation NORIEUX dit D pour NORIEUX dit DAUSSONNE.

Famille I

Jehan I NORIEUX dit D, mort avant 1592, et sa femme Marie LEFÉBURE, eurent 5 enfants :
1) Loyse NORIEUX dit D l’aînée, + entre 1586 et 1588, épouse de Pierre CHARDON, maître chaussetier à Tours,
2) Simon DAUSSONNE, + avant 1592, armurier à Nantes,
3) Marie NORIEUX dit D, épouse de Macé LEGENDRE, maître armurier à Tours,
4) Jehan II DAUSSONNE, armurier à Paris, dont le fils Jehan III fut armurier du roi en son château de Nantes, à Paris et à Tours,
5) Loyse DAUSSONNE l’aînée, épouse successivement de Jehan LEROYER, imprimeur, et d’André GARNAULT.

Famille II

L’armurier Laurent NORIEUX (NOZIEU), mort avant 1586, époux d’Antoinette GALLET, avait deux frères armuriers (ou arquebusiers), Katherin et Ollivier (acte du 25.02.1557, 3E1/68).

Famille III

Jehanne YVON, épouse de NN … NORIEUX, a eu au moins trois enfants :
1) Jehan, arbalétrier, époux de Marie MOTHERON,
2) Françoise, épouse de Michel SUEDOR, maître arbalétrier,
3) François, sellier, époux de Nicole ROUSSEAU.
Je n’ai pas trouvé de lien entre ces trois familles, même en comparant les différents parrains et marraines.

On pourrait encore citer :

  • Renée NORIEUX, épouse de Jehan CAILLAULT, armurier (18.09.1598, 3E5/241),
  • Loyse NORIEUX, épouse de René CHANDERYS, ouvrier en soie (18.0.1598, 3E5/267).

D’après Eric Reppel (voir note 1), Jean I NORIEUX (famille I) serait fils d’Etienne (serait-ce l’Etienne VENDUISTRE du début de cet article ?) et cousin germain de Laurent NORIEUX (famille II).
Ces familles sont alliées à l’importante famille protestante NORIEUX du XVIIème siècle, puisqu’au contrat de mariage avec Jacques MASNIER de Marie LEGENDRE, petite-fille de Marie NORIEUX (famille I), l’un de ses témoins est le protestant Philippe NORIEUX, maître orfèvre à Tours, son « cousin ». Mais je n’ai pas trouvé le lien exact. Toutefois, le premier enfant du protestant Guillaume NORIEUX a pour parrain un Laurent NORIEUX, qui pourrait être un membre de la famille II.

EN CONCLUSION

On constate qu’il n’est pas possible de savoir quand le patronyme est passé sans doute de VENDUISTRE à DAUSSONNE, puis à NORIEUX. Ce passage a dû se faire progressivement, suivant les circonstances. On ne sait même pas d’où vient le nom NORIEUX.
Quand on sait qu’il y a eu des armuriers DAUSSONNE non seulement à Tours, mais aussi à Paris, Nantes et même Bordeaux, on se dit qu’il y a encore beaucoup de choses à découvrir !

Sources
1Reppel (Eric). Minorités et circulations techniques : la confection des armures à Tours (XVème – XVIème siècles).
Documents pour l’histoire des techniques. 1er trimestre 2008.
2Toutes les minutes de notaires citées sont conservées, sauf indication contraire, aux Archives Départementales d’Indre-et-Loire.

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Gasnier
Gasnier
2 années plus tôt

Une belle étude généalogique.