F comme Foulon

F comme Pierre PERIGEON, marchand foulon à Abilly :
Article de Catherine MOREAU, adhérente du Centre Généalogique de Touraine.

F comme La technique du foulon, également utilisée pour la fabrication du papier :
Article de Catherine BAS-DUSSEAULX, Vice-Présidente du Centre Généalogique de Touraine.

Pierre PERIGEON, marchand foulon à Abilly

Pierre PERIGEON, fils de Pierre PERIGEON et de Marie PAULMIER, est né avant 1675, sans doute à Coussay-les-Bois ou dans une des paroisses environnantes. Il a un frère Joseph, baptisé à Coussay-les-Bois le 17 décembre 1675 (à cette date leur père est déjà décédé).

Coussay-les-Bois est une paroisse appartenant au diocèse de Poitiers, aux limites de la Touraine (carte Cassini gallica.bnf.fr)

Le 2 juillet 1680, la mère de Pierre et Joseph, Marie PAULMIER, se remarie à Chaumussay avec Mélaine CARTIER : elle présente un certificat de publication de bans signé MÉNARD, prieur curé de Saint-Martin d’Angle, paroisse où elle demeurait en 1680.

Mélaine CARTIER et Marie PAULMIER vont alors s’installer dans la paroisse d’Abilly, où naîtra leur premier fils Antoine. Il sera baptisé le 31 mai 1681. Pierre PERIGEON aura ainsi d’autres frères et sœurs : Marie, née vers 1683, et Mélaine (ces deux derniers nés sans doute à Abilly, les registres y étant lacunaires après 1681).

Nous perdons la trace de Pierre PERIGEON jusqu’à son mariage avec Anne MÉREAU, fille de MÉREAU Michel et GEORGEON Renée, le 20 juillet 1693 à Neuilly-le-Brignon, paroisse proche d’Abilly. A cette époque, Pierre vivait dans la paroisse d’Azay-le-Ferron, puisqu’il présente un certificat de publication des bans, signé BROUILLARD, curé d’Azay-le-Ferron.
A son mariage sont présents Jean et Marie GUIGNARD, ses cousins germains : on retrouve à Coussay-les-Bois, un Jean et une Marie GUIGNARD, enfants de Jean GUIGNARD et d’Anne PERIGEON. Anne PERIGEON serait donc la tante paternelle de Pierre.

De l’union de Pierre PERIGEON et Anne MÉREAU naîtront au moins huit enfants, tous à Abilly :

  1. Laurent, baptisé le 1er août 1695 : ses parrain et marraine sont BARREAU Gilbert et PORCHER Jeanne. Il est inhumé le 21 mai 1710.
  2. Anne, baptisée le 10 mai 1698 : ses parrain et marraine sont GENINET Charles et MÉREAU Hilaire. Elle est inhumée le 23 mai 1698.
  3. Marie, baptisée le 19 juin 1699 : ses parrain et marraine sont MÉREAU Antoine et CARTIER Marie. Elle épouse Antoine DUBOIS, fils de Jean et ROY Marie, le 18 juillet 1718 à Abilly, après avoir passé contrat devant Maître VÉRON, notaire à Leugny, le 24 janvier 1718.
  4. Pierre, baptisé le 8 mars 1701 : ses parrain et marraine sont VÉRON François et CHALORISE Elisabeth. Il épouse en premières noces Louise MÉREAU, fille de Louis et Marie JOUTEUX le 12 septembre 1724 à Abilly. Louise décède le 4 juin 1727 à Abilly. Pierre épouse en secondes noces Marguerite SAULNIER, veuve de Gabriel DENIAU, le 24 mai 1728 à Ingrandes (86). Pierre décède le 3 mai 1776 à Saint-Rémy-sur-Creuse (86).
  5. Marie Anne, baptisée le 5 octobre 1702, ses parrain et marraine sont Gabriel TOPEAU et Marie TRANCHAND. Elle épouse en premières noces Jacques GIRAUD le 22 janvier 1720 à Abilly, puis en secondes noces Jacques TROUVÉ le 27 juillet 1733 à Leugny (86).
  6. Marthe, baptisée le 18 septembre 1705 : ses parrain et marraine sont François VÉRON et Charlotte de MARAN. Elle décéde le 22 mars 1713 à Abilly.
  7. Claude, baptisé le 17 décembre 1707 : ses parrain et marraine sont Claude ANGUILLE et Marguerite VÉRON. Il épouse Marguerite MÉREAU, fille de Louis et Marie JOUTEUX le 14 janvier 1732 à Abilly.
  8. Marguerite, baptisée le 8 juin 1711 : ses parrain et marraine sont Joseph DESTOUCHES et Marguerite PAGER.

Pierre et Anne resteront sur la paroisse d’Abilly.
Pierre exerce la profession de foulon ou de marchand foulon. La première mention de son métier de foulon apparaît dans les registres paroissiaux en 1695 lors du baptême de son fils Laurent :

1695 Abilly AD37 – BMS 1694-1700 6NUM7_001_003 page 14

Le foulon est un artisan ou ouvrier qui foule les tissus de drap ou de laine pour les dégraisser et les assouplir ; le foulon ou le foulonier peut aussi fouler les peaux et les cuirs. Pierre PERIGEON a travaillé des peaux en 1705 pour Michel LEHEULLE et Louis JULIEN, tous deux maîtres gantiers de la paroisse de La Haye :

« Pierre Perigeon, marchand foulon, demeurant paroisse d’Abilly, lequel a reconnu et confessé avoir fait cession, délais et transport, par ses présentes avec promesses de garanties fournir et faire valoir à Michel Leheulle, aussi marchand gantier, demeurant en cette ville de la Haye, à ce présent stipullant et acceptant, savoir est la somme de huit livres deux sols, à lui due par Louis Julien, marchand aussi gantier, pour avoir fouler des peaux passées en huiles en son moulin … »
(Acte de cession Pierre Perigeon Michel Leheulle, le 12 mars 1705, chez Mtre Legeay, notaire à la Haye, 3E53277).

Il travaille dans un moulin à foulon : le principe de ce moulin est d’actionner un arbre entraîné par une roue hydraulique, qui tourne devant une batterie de maillets placée en position de bascule au-dessus des cuves à draps ou autres textiles. Il s’agit d’un fouloir.

Vue aérienne du moulin d’Abilly

Le moulin où travaille Pierre PERIGEON se situe à l’entrée d’Abilly, au bord de la Claise, sur la route venant du Grand-Pressigny.

Pierre PERIGEON prend un bail à ferme, concernant ce moulin des foulons à Abilly le 12 novembre 1699, chez Maître Bry, notaire à la Haye. Le bail est établi par Pierre et Charles GARNIER, marchands fermiers de la seigneurie du Petit-Paulmy : ce bail concerne la location du moulin et des terres joignant le moulin à foulon. Il est établi pour le temps de sept années et sept cueillettes, pour la somme de quatre-vingt-cinq livres payables au jour de Noël et de la Saint-Jean-Baptiste. Dans cet acte, Pierre PERIGEON est déjà mentionné comme marchand foulon, demeurant au Moulin à foulon de la seigneurie de Paulmy : ce n’est donc pas le premier bail. En revanche, Anne MÉREAU est associée conjointement et solidairement à son époux. Le 7 juin 1707 le bail à ferme est renouvelé, toujours chez Maître Bry, notaire à la Haye : il est établi par Pierre GARNIER, marchand demeurant paroisse de Balesmes, lequel comme ayant charge de messire Yves Jacques Charles du PLESSIS, comte de la Rivière, seigneur de Paulmy. Le terme du bail était toujours de quatre-vingt-cinq livres, payable le jour de Noël et de la Saint-Jean-Baptiste, valable cette fois pour six années.

Ramage de Mür
Rivière (de la) : d’azur à la croix engeslée d’or

Yves Charles Jacques du PLESSIS, comte de la Rivière, était seigneur de Paulmy par la suite de son mariage en 1689 avec Marie Celeste Françoise de VOYER, fille de Jean Armand de VOYER, vicomte de Paulmy, gouverneur de Châtellerault et Anne Radegonde de MAUROY. Le moulin de foulon d’Abilly appartenait à la seigneurie de Paulmy ; le seigneur de Paulmy en possédait les droits seigneuriaux dans le cadre des banalités.

Anne MÉREAU décède en septembre 1716 ; elle est inhumée à Abilly le 10 septembre, à l’âge de quarante ans. Le 25 janvier 1718, Pierre PÉRIGEON convole en secondes noces, à Leugny, avec Marie ROY veuve de Jean DUBOIS, la belle-mère de sa fille Marie. Sont présents Mélaine CARTIER, frère de l’époux et Antoine DUBOIS, fils de l’épouse. Pierre et Marie établissent un contrat de mariage le 24 janvier 1718, devant Maître Véron, à Leugny. Marie ROY est inhumée le 23 août 1720 à Abilly. Le 25 novembre 1720, Pierre se marie en troisièmes noces avec Marie JOUTEUX, veuve de Louis MÉREAU, la mère de Louise, épouse de son fils Pierre. Leur union est accompagnée d’un contrat signé chez Maitre Guérin le 30 novembre 1720.

Cet inventaire comprend diverses pièces de vaisselle et ustensiles de cuisine, des pièces de linge et de toile, des meubles (coffres de noyer fermant à clef, maie de bois de chêne, armoire à deux battants fermant à clef, plusieurs lits avec leurs draps, couettes, paillasses, traversins). Dans une des chambres se trouve un lit garni et une table en noyer, mais aussi le moulin à foulon, ainsi que divers outils (marc, piarde, cognée), ensuite dans un grenier il y a plusieurs livres de chanvre, de la bourre de maille, de la bourre de chardon, 80 pièces de mérain. Dans le cellier se trouvent des poinsons de vin, ainsi que des basses. Dans l’écurie, il y a deux mulets, un multon, une jument, avec leurs bâts et leur arnois, puis dans l’étable il y a trois vaches, et quatre porcs. Au lieu dit « La Marche », Pierre PÉRIGEON possède une grange avec grenier, dans laquelle il y a six cents boisseaux de blés (froment, méteil, seigle et orge), un tord à brebis où se trouvent quarante chefs de brebis et moutons, Pierre déclare aussi qu’il a mis en garde plusieurs chefs de brebis chez des habitants de la paroisse. A tout cela s’ajoutent les dettes que diverses personnes ont envers Pierre PÉRIGEON : travail de foulonnage non payé, vente de céréales ou de foin, prêt d’argent. Tous ces biens sont évalués à la somme de 2970 livres, auxquelles il faut retirer 226 livres dues par le dit PERIGEON (arriérages de droits au Comte de la RIVIÈRE, location de prés, sommes dues au curé, gages dus à ses valets et servantes). Cet inventaire semble montrer une certaine aisance.

Pierre PÉRIGEON décède le 3 octobre 1743 à Abilly, à l’âge de soixante-dix-sept ans.

Généalogie PERIGEON Pierre (Sosa 1)


Qu’en est-il des descendants de notre marchand foulon et du moulin du Petit-Paulmy ?

Un des fils de Pierre, Claude, époux de MÉREAU Marguerite, est dit marchand foulon en 1732 au baptême de son fils Claude (on peut supposer qu’il travaillait avec son père). Claude décède en 1734.
Le fils de Claude épouse Jeanne BRICHETEAU à Abilly en 1758. De cette union naîtront Jeanne et Jean : lors de ces deux baptêmes, Claude est dit marchand foulon, a-t-il repris le moulin de son grand-père ?
Après le décès de Jeanne BRICHETEAU, Claude épouse en secondes noces Madelaine SERREAU à Châtellerault en 1770 : de cette union naîtra un fils Claude en 1771.
Claude 2, décède en 1782 à Abilly. Le troisième Claude se marie en 1795 au Grand-Pressigny avec Esther GRINDELLE, fille de Pierre GRINDELLE, maire du Grand-Pressigny. De cette union naîtra une fille, Esther (malheureusement cette enfant meurt à l’âge de huit jours en 1798, tout comme sa mère qui meurt en couches). A la naissance d’Esther, son père est dit foulon, demeurant au moulin du Petit Paulmy : cette fois il en est propriétaire, a-t-il pu l’acquérir pendant la Révolution ?
En 1816, on retrouve notre Claude dans les registres d’état civil d’Abilly où il signe en tant que maire. Cela jusqu’à son décès en 1819. Cette branche s’éteint avec le décès de Claude.

Dans les recensements d’Abilly de 1836, on trouve mention d’un foulonnier, il s’agit de TERRASSIN François Hilaire époux de CARPY Marie : ils se sont mariés en 1822, lors de la naissance de leurs enfants ; il est bien dit propriétaire fermier au moulin du Petit-Paulmy. Il décède en 1844. 

Sur les recensements de 1846, c’est sa veuve qui occupe le moulin ; sur ceux de 1851, c’est son gendre Hubert COURSAULT, époux de sa fille Joséphine TERRASSIN ; il en est de même en 1856.

Sources :
ADV : registres paroissiaux de la paroisse de Coussay-les-Bois,
ADIL, registres d’état civil de la paroisse et de la commune d’Abilly,
Liasses notariales Maître Legeay 3E 53277, Maître Bry 3E 53319 et 3E 53322, Maître Véron 3E 53584, Maître Guérin 3E 53325.
Cadastre rénové section D. 
Recensements de la commune d’Abilly, 1836,1846, 1851, 1856.
Crédit photographique : Eric et Catherine Moreau, collection privée.
Vue aérienne : Google Earth
Schéma et définition du foulon : wikipédia
Carte de Cassini
Sources armoiries : Overblog : Histoire, généalogie et patrimoine à Ploeuc : La Rivière, seigneurs de Ploeuc de la Corbière et du Pont de L’Asne 1664-1781


La technique du foulon,
également utilisée pour la fabrication du papier

Le papier, matériau banal s’il en est ! Support incontournable de l’écriture, du dessin et de l’impression et matière première idéale pour l’emballage. Pourtant cette banalité n’a pas toujours été le sort de cet envahissant objet de notre quotidien. Il fut même une époque où il était fort rare et fort cher ! Et même si la technique de sa fabrication, connue en Asie dès 8 avant J-C., fut jalousement préservée par ses découvreurs jusqu’au VIIIème siècle de notre ère.[1]
Diffusé à travers le monde et connu suite à l’expansion de l’Islam, l’usage du papier arrive en Europe occidentale au XIIIème siècle et dans le nord de la France au milieu du XIVème, aux environs de Troyes (Aube).
D’abord considéré comme un sous-produit destiné plutôt aux brouillons ou aux minutes, le papier va rapidement dépasser l’usage du parchemin et, au début du XVème siècle, il est utilisé partout pour toutes les tâches. En France, en particulier, la production est suffisante pour satisfaire les besoins et certains fabricants peuvent même commencer à exporter.

Cependant, quoiqu’on fasse, pour obtenir du papier il faut des matériaux d’origine végétale, de l’eau et de l’énergie, car c’est la mise en suspension dans l’eau de fibres végétales broyées puis égouttées sur une surface plane qui permet d’obtenir une feuille de papier.

L’eau, elle est là, tout près et abondante dans les ruisseaux et rivières qui émaillent notre territoire.
Les éléments végétaux, on peut les obtenir assez facilement soit dans nos forêts, soit avec les tissus usagés.
Quant à l’énergie nécessaire, ce sera l’affaire des moulins, encore une fois.

Mais ce sont des « usines » un peu particulières, car il a fallu modifier le traditionnel moulin à farine et remplacer ses meules, au mouvement circulaire, par un dispositif créant un mouvement alternatif. La roue actionne désormais un arbre à cames qui soulève et laisse retomber des maillets, aux têtes armées de clous, dans une ou plusieurs cuves taillées dans la pierre contenant un amas de chiffons déchiquetés et trempés pendant au moins 3 mois dans une eau savonneuse mélangée à de la colle animale.
Un courant d’eau claire et pure entraîne en même temps les impuretés évacuées par un tambour.

Cette pâte passe ensuite dans une cuve de raffinage, là où l’on ajoute des substances chargées d’agglutiner les fibres et d’en boucher les pores afin que le papier ne « boive » pas.
Enfin, elle est déposée dans un cadre en bois à la dimension des feuilles que l’on veut obtenir et dont le fond est composé d’une toile métallique très fine, ce qui permet de l’égoutter par secouage et faciliter ainsi l’élimination de l’eau et le feutrage de la matière.

La feuille obtenue, humide et sans consistance, est alors placée entre deux feutres bien secs, empilés et pressés. Puis les feuilles sont mises à sécher à la verticale dans des greniers bien ventilés.[2]

[1] https://fr.wikipedia.org/wiki/Papier
[2] Dictionnaire Pratique Quillet, 1968

4.8 4 votes
Évaluation de l'article
Partager via :
S'abonner aux commentaires
Me notifier des
guest

0 Commentaires
Inline Feedbacks
View all comments