

Source : article paru dans la revue « Petite Histoire de Touraine » par R. VIVIER (Agrégé d’Histoire, Inspecteur d’Académie) et E. MILLET (Directeur d’École à Tours) – imprimée par Arrault et Cie 1945.
La floraison artistique tourangelle des XVe-XVIe siècles est surtout caractérisée par une architecture civile d’hôtels et de châteaux. L’art religieux se prolonge cependant dans de belles chapelles aux fenêtres flamboyantes (Ussé, Montrésor, Champigny-sur-Veude) et se laisse pénétrer de décoration italienne.
Les hôtels restent gothiques (escaliers à vis, fenêtres avec pinacles, mariage de la brique et de la pierre blanche) ou se teintent de mode italienne importée par la colonie d’artistes italiens d’Amboise (hôtel Goüin).

Deux châteaux sont caractéristiques de cette évolution architecturale. Ce sont les deux bijoux de la Renaissance tourangelle édifiés d’un seul jet : Azay-le-Rideau et Chenonceau, tous deux construits par deux femmes de financiers au milieu des eaux.
Azay-le-Rideau comprend un logis principal flanqué d’une aile en retour d’équerre : des tours d’angle en encorbellement, des mâchicoulis devenus des corniches décoratives, des toits en poivrière rappellent le château féodal. Mais ce château s’aère en demeure de plaisance lumineuse grâce à d’immenses fenêtres coupées d’une croisée de meneaux (jambages de pierre) ; la cage d’escalier est éclairée à chaque étage par une double fenêtre en plein cintre surmontée d’une lucarne monumentale. Mais l’artiste a utilisé avec intelligence et une discrétion toute française la décoration italienne.

Azay-le-Rideau, comme tous les châteaux de la Renaissance, est situé dans un cadre de verdure et de jardins dessinés par des mains expertes.
L’art tourangeau au XVIe siècle résume toutes les aspirations françaises : en sculpture, l’atelier de Michel COLOMBE reproduit avec exactitude les costumes et les traits de jeunes tourangelles ; mais l’œuvre capitale du grand artiste est à Nantes (tombeau de François II de Bretagne). La sculpture funéraire est en honneur (tombeau des enfants de Charles VIII dans la cathédrale de Tours, tombeau des Bastarnay à Montrésor).

(dit Jérôme PACHEROT) – Cathédrale de Tours

On aimait aussi les fontaines monumentales aux eaux jaillissantes : Fontaine de Beaune due aux frères FRANÇOIS, Fontaine de la place Foire-le-Roi due à l’atelier des frères JUSTE (Italiens) qui contribuent, pendant un demi-siècle, à accentuer l’inspiration italienne dans la sculpture tourangelle.

N’est-ce pas à Jehan FOUQUET que le XVe siècle doit le privilège de continuer la tradition de la miniature carolingienne ? Il est un portraitiste exact et surtout un excellent paysagiste (miniature au ciel ligérien d’un bleu vaporeux dominant la Loire et ses coteaux flanqués de châteaux à tourelles).
La peinture sur verre est aussi prospère : dans les églises rurales, que de vitraux commandés par les financiers et les seigneurs ! Cet art du vitrail se résume surtout dans l’éblouissement de la chapelle de Champigny-sur-Veude dont les vitraux sont dus sans doute à l’atelier des PINAIGRIER. Ils représentent une triple chanson de geste : épopée biblique du Christ, geste du grand croisé du XIIIe siècle (Saint-Louis), épopée féodale de la famille des BOURBON-MONTPENSIER.