
Article de Francine ROBIN, adhérente du Centre Généalogique de Touraine, paru dans le Touraine Généalogie n° 98 page 310 – 2ème trimestre 2014 dans la rubrique « Histoire et Généalogie »
Outre sa belle église romane, son manoir, les quatre lavoirs, la commune de Saint-Martin-Le-Beau possède 3 moulins qui ont chacun leur secret.
Le premier, le moulin de Nitray
existerait depuis 1336. Mon ancêtre Léonard PERRAULT, qui possédait ce moulin, l’a vendu en 1815 à Auguste MONTAGNE, marchand aubergiste à Amboise, pour la somme de 14000 francs.
Des actes de 1822 décrivent les mécanismes de ce moulin : « le moulin est à blé avec 4 paires de meules et machineries à tan, le tout entraîné par une roue en dessous à mécanisme d’élévation en fonction du niveau du Cher, de type moulin pendu antérieur à la Révolution ».
M. CAPET, ancien maçon qui a travaillé sur les lieux, m’a appris qu’en 1922 un ingénieur a loué ce moulin pour le transformer en usine produisant de l’électricité. Son idée fut de démonter l’ancien mécanisme du moulin pendu installé depuis le XVIIème siècle et de remplacer la roue par une turbine « noyée » qui produirait de l’énergie.
Malheureusement, en 1942, un incendie a ravagé presque la totalité du moulin. Le Cher était à cet endroit un lieu de passages clandestins : en effet, le moulin était en zone occupée et l’éclusier en face en zone libre.
Seul le moulin gardera le secret de cet incendie criminel ou non.
M. FALLO a reconstruit le moulin et la turbine a cessé de fonctionner en 1953, l’usine n’était plus rentable alors que la Société des Forces motrices de l’Ouest l’avait reprise.



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Le secret du second moulin, le moulin de l’étang de Battereau…
…est qu’il est invisible pour un simple promeneur ! La propriétaire actuelle, Mme PIERRE, le garde à l’abri des regards et pour cause : toute la machinerie est à l’intérieur de sa maison ! J’ai vu la roue à aubes et les meules au premier étage, qui ont servi autrefois à ses ancêtres meuniers.
Il est vrai que Mme Geneviève SERRAULT, épouse PIERRE, descend d’une famille ancestrale de meuniers : son père, son grand-père et son arrière-grand-père étaient meuniers, comme leurs ancêtres les GAUDION :
- Nicolas GAUDION, né à Saint-Règle le 19 juin 1717, décédé à Saint-Martin-le-Beau le 6 novembre 1786. Il a acheté le moulin à Madame de ROHAN, étant lui-même descendant d’une famille de meuniers de Saint-Georges-sur-Cher et descendant direct de Simon GAUDION né le 29 octobre 1594, meunier au moulin de Chazelle.
- Nicolas François Barthélémy GAUDION, né le 23 août 1743 à Saint-Martin-le-Beau, décédé le 11 août 1809 à Saint-Martin-le-Beau (fils du précédent)
- Louis FILLET, né à Saint-Martin-le-Beau le 15 octobre 1762, décédé le 8 janvier 1835 à Saint-Martin-le-Beau (gendre du précédent)
- Jean BLESVES, né à Dierre le 22 juillet 1786, décédé le 23 janvier 1864 à Saint-Martin-le-Beau (gendre du précédent)
- Silvain SERRAULT, né à Saint-Martin-le-Beau le 2 juin 1837, décédé le 5 octobre 1920 à Saint-Martin-le-Beau (gendre du précédent).
On compte aussi, parmi les propriétaires du moulin de Battereau, un autre gendre de Nicolas François Barthélémy, Jean CARRE époux de Catherine GAUDION, fille de Nicolas François Barthélémy.
Note : Madame SERRAULT est décédée en 2019. Ses enfants ont transformé la propriété en chambres d’hôtes : il est donc possible maintenant d’apercevoir certaines parties du moulin (meules), invisibles de l’extérieur, sur le site des chambres d’hôtes.
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Ce même CARRE possédait aussi le troisième moulin dont je vais vous livrer le secret :
Le moulin de Saint-Martin

En montant vers Coulaine, vous pourrez admirer ce « moulin à vent » au milieu des vignes.
Avec un géomètre, je découvre que la parcelle est située au lieu-dit « Le Grand Poirier » et porte le numéro cadastral 2934bis : c’est François CAPILLON qui le possède depuis 1826 mais en terrain nu et, en 1850, Jean CARRE (le meunier qui possède déjà le moulin de Battereau) l’achète. Mais l’agent des archives me fait remarquer une toute petite note écrite en marge « en cours de démolition » !
La lourde imposition sur les moulins à cette époque aurait-elle découragé le meunier ?
Ce moulin-cavier, au milieu des vignobles martinois, a-t-il fonctionné ? A-t-il seulement eu un jour des ailes ? Le vent était-il suffisant à cet endroit ?
Et alors, qui l’a fait construire, CAPILLON ou CARRE ? Mes longues recherches ne me permettent pas de le dire…
C’est un moulin qui sert maintenant de rendez-vous de chasse, un moulin qui fait rêver mais qui n’a jamais eu d’histoire…

A noter qu’il existait un autre moulin à vent à Nouy, discernable sur le plan napoléonien à 150 m du lieu-dit du Vieux Château, qui aurait pu être une ferme rattachée au château de la Bourdaisière mais dont il ne reste aucun vestige apparent.